ROLAND CLERY
On disposait d'agents de liaison. On informait le
destinataire qu'on envoyait un télégramme, on chiffrait, puis on attendait la
réponse.
Parmi les 200 plus jeunes résistants, il y avait 70
agents de liaison. C'était souvent des femmes, car ne faisant pas de politique,
elles n'étaient pas considérées comme dangereuses par les Allemands. Souvent
même, ces femmes ou ces jeunes, qui portaient les valises contenant les radios,
étaient aidés par les Allemands qui leur portaient la lourde valise. L'ennemi ne
se doutait pas que des jeunes puissent passer des télégrammes.
Le message reçu, je le donnais à un déchiffreur,
qui le donnait à mon chef de réseau. Lui me communiquait la prochaine heure
d'émission et la date.
Dans mon réseau, une personne était responsable de
moi. C'est elle qui me disait à quelle heure émettre, sur quel quartz et sur
quelle longueur d'ondes. On me donnait une demi-heure avant le télégramme à
émettre.
Une fois que j'avais reçu le télégramme, un agent
de liaison venait le chercher, prenait le télégramme et le déchiffrait à Vichy.
Elle était tranquille et en sécurité. Personne n'aurait imaginé qu'on
déchiffrait dans un hôtel à côté de celui de Pétain.
Au sujet des intermédiaires : j'avais un
télégramme, que je portais dans une maison d'alimentation rue de Lille. Je
demandais au gérant une boite de petits pois ou de haricots et je lui passais
le télégramme. Une demi-heure après un membre du réseau venait demander de la
marchandise et le gérant lui passait de la marchandise. C'était la "boite
aux Lettres".
J'avais un agent de liaison qui appartenait à mon
réseau. Je la prenais pour une martiniquaise. C'était Joséphine Baker. J'étais
un de ses radios. C'était une vedette. Elle est partie en Algérie où elle a
ouvert une boite de nuit. L'intégralité de ses recettes était envoyée en
Angleterre pour parachuter des armes et envoyer de l'argent.
A Paris, c'était scabreux de se déplacer avec un
poste de radio. J'avais avec moi un petit scout de 14 ans avec un sac à dos. Je
mettais le poste dedans et il partait à bicyclette.
Je suis resté sur Paris jusqu'en février 1943.
LUCIEN DUVAL
Le 16 Mars, j'emménage avec Roger Pornet au 1 rue de Miribel,
dans une pension tenue par Mlle Brenier, personne âgée d'une cinquantaine
d'années.
Côté cocasse, au rez-de-chaussée se trouve un garage abritant les
voitures gogios allemandes. Lorsque nous émettrons de Grenoble ou de ses
environs, nous entendrons les voitures sortir.
* PAYER LES AGENTS
LUCIEN DUVAL
* PAYER LES AGENTS
LUCIEN DUVAL
Chaque mois, mais plus ou moins régulièrement, suivant les
difficultés d'acheminement par la Suisse ou par voie aérienne, le somme
nécessaire au versement des soldes des agents P2 me sera remise.
C'est ainsi
par exemple qu'en Septembre 1943, il me sera remis 150.000 A.F (valeur en
francs 1997 : 170.000F). Il s'agissait toujours de billets de 5.000F (5700F de
1997) neufs, imprimés en Angleterre. Pour éviter tout problème il était
préférable de ne pas effectuer ses paiements avec de tels billets.
Grâce à la
complicité d'un caissier de banque (B.N.C.I) je pouvais échanger ces billets
contre des billets d'une valeur inférieure et usagés.
Je tenais,
bien sûr, une comptabilité et j'avais chaque mois à justifier les dépenses du
secteur : soldes des agents, frais de déplacement, achat de matériel etc.