Après la défaite de juin 1940, les Britanniques ne disposent
plus d’aucune information fiable sur la France occupée.
Au printemps 1941, un
rapprochement s’opère entre la French section du SOE et le service de
renseignement de la France Libre du général de Gaulle, le Bureau Central de
renseignements et d’action (BCRA),
dirigé par le colonel Passy fournit à la Résistance intérieur des armes et du
matériel de transmission.
Ces deux organismes, qui entrent souvent en
concurrence regroupent ainsi tout un ensemble d’agents parmi lesquels des
équipes d’opérateurs radio parachutés lors de missions de renseignement, de
sabotage ou visant à la création de réseaux.
Dans leur grande majorité, ces
hommes sont des radios de formation, issus des trois armées même si certains
d’entre eux proviennent de la société civile.
Le plus souvent parachutés sans
personne pour les réceptionner, ils accompagnent un officier ou une équipe mais
peuvent aussi être déposés « au clair de lune » par de petits avions,
des Lysander, ou plus rarement par
des sous-marins.
« Pianistes », tel le nom de code utilisé
dans la Résistance pour désigner les opérateurs radio qui assurent les
communications entre la France occupée et Londres puis Alger.
La formation des
premiers opérateurs envoyés en France est assurée par les Britanniques. Il faut
en moyenne trois à quatre mois pour former un « pianiste », les
quelques personnels volontaires sans formation de base ayant pour leur part une
instruction plus poussée de près de six mois.
Mais le recrutement des
opérateurs devient très vite une cause de différends entre Français livres et
Britanniques, ces derniers se refusant à travailler avec des agents qui n’ont
pas suivi de formation dans leurs centres spécialisés. Ils estiment qu’un
recrutement direct en France, comme le BCRA le préconise dès la fin 1941,
présente des risques trop importants d’infiltration d’agents à la solde de
l’Allemagne.
Ce n’est qu’un an plus tard, en raison de pertes considérables - 75%
des radios sont arrêtés au cours des années 1941 et 1942 et près de la moitié
exécutés-, que débute la formation d’opérateurs sur le territoire
métropolitain.
Ces derniers, contrairement à ceux issus du milieu militaire qui
disposent de tous les papiers nécessaires à la clandestinité (fausses cartes
d’identité, de travail, d’alimentation, Ausweis de nuit pour pouvoir circuler…)
ainsi que d’une solde qui leur est versée chaque mois par leur chef de secteur,
sont tenus d’assurer par eux-mêmes leur subsistance.
Au cours des phrases de
vacation, le radio est totalement coupé du monde extérieur, avec un casque sur
les oreilles et la main sur le manipulateur afin d’émettre ses signaux en
morse.
Il ne peut ni voir ni entendre arriver une personne extérieure.
Aussi,
a-t-il à ses côtés un « gardien » qui doit être en contact visuel
avec un guetteur qui surveille les environs. En outre, le pianiste ne doit
jamais être armé ni transporter seul son matériel, bien que de telles pratiques
n’aient pas toujours été aisées à respecter. Son gardien, bien souvent un agent
de liaison, a également pour mission de trouver de nouveaux asiles, afin de
rendre le repérage le plus difficile possible.
LUCIEN DUVAL, chef de réseau :
LUCIEN DUVAL, chef de réseau :
Mes journées sont bien remplies, souvent levé à 6 heures, pas
couché avant minuit.
Les messages reçus de Londres devaient parvenir le plus
rapidement possible à la Centrale. Nous les tapions à la machine, parfois fort
tard (quand l'équipe rentrait par un train à 22 heures), sur papier extra fin,
donc plus facilement dissimulable ou ingérables. L'agent de liaison partait dès
le lendemain matin par le premier train.
Tension et
stress permanents : Agents non présents au rendez-vous, non présents à
l'arrivée d'un train, alerte nous obligeant à déménager le matériel, difficulté
d'émission, retard de trains, contrôles d'identité, barrages fouilles,
descentes de police la nuit dans différents quartiers, rafles dans Grenoble
auxquelles nous échapperons plusieurs fois de justesse, méfiance envers tout le
monde, toujours sur nos gardes, veiller à ce qu'on ne soit pas suivi.